PRESIDENTIELLE 2024 Pourquoi Sonko doit arrêter sa grève de la faim
En grève de la faim depuis le 30 juillet dernier, Ousmane Sonko n’a aucune raison de poursuivre sa diète au risque d’hypothéquer le projet Pastef dont le triomphe est parfaitement envisageable au soir du 25 février 2025 sans qu’il soit forcément candidat. Explication.
La formule a déjà été expérimentée avec succès aux législatives de juillet 2022. La liste titulaire de Yewwi Askan Wi qu’il dirigeait invalidée, Ousmane Sonko n’avait pas hésité à faire contre mauvaise fortune bon cœur. Décidé à faire triompher sa coalition, il sillonna le pays tambour battant, appelant partout à voter massivement pour la liste des suppléants de Yewwi Askan Wi au scrutin proportionnel et en faveur de l’inter-coalition Yewwi-Wallu au scrutin majoritaire. La suite, on la connaît. L’opposition se retrouva pratiquement avec le même nombre de députés que la mouvance présidentielle. Une première dans l’histoire politique du Sénégal !
A présent qu’il est en détention et que son parti est officiellement dissout, il n’aura sûrement pas la même marge de manœuvre qu’aux législatives de juillet 2022. Mais, il pourra tout de même jouer sa partition, à condition qu’il mette fin à sa diète pour ne pas y laisser la vie.
D’ores et déjà, une chose est sûre. Sonko et son grand rival, Macky Sall, seront les absents les plus présents à la présidentielle 2024. Contraint de surseoir à une troisième candidature sous la pression de la rue et, surtout, sous l’impulsion de Sonko, Macky Sall s’est fait un point d’honneur d’empêcher son principal adversaire d’y prendre part. Résultat : ils se sont tous les deux neutralisés avec la perspective de jouer les prolongations en février prochain avec leurs candidats respectifs interposés.
Présidentielle 2024 ou la prolongation du duel Macky-Sonko
Si l’on devait emprunter une image pour bien se projeter sur ce qui risque de se passer en février prochain, c’est bien dans le domaine du sport qu’on devrait la chercher. Et pour cause, le duel Macky-Sonko a été sanctionné jusqu’ici par un score de parité. Certes, ils se sont mutuellement éliminés de la course à la présidentielle 2024, mais ils ont encore tout le loisir de jouer les premiers rôles en s’offrant des prolongations.
Sous ce registre, Macky Sall a manifestement toutes les cartes en main pour choisir son propre candidat et en faire le porte-étendard de la mouvance présidentielle. A Sonko de saisir l’opportunité du parrainage désormais optionnel pour en faire de même. Fini en effet le schéma où seul le parrainage citoyen avait droit de cité et où tout prétendant à la candidature pouvait s’exposer à l’invalidation du Conseil constitutionnel sur la base de doublons ou de tout autre motif. A la faveur du parrainage optionnel, il suffit désormais, outre le nombre de signatures équivalant à 0,6 ou 0,8% des électeurs inscrits sur le fichier, de 13 députés pour faire accepter une candidature. Autant dire une aubaine pour l’opposition et principalement les « patriotes » fidèles à Sonko qui, avec 24 députés actuellement à l’hémicycle, ont largement la possibilité de parrainer un candidat autre que Sonko et sous la bannière de leur choix. Ce qui n’aurait pas été possible si le projet de modification de l’article 87 de la Constitution était arrivé à son terme avec la possibilité pour le Président de la République de dissoudre l’Assemblée à tout moment.
A croire que c’était pour enlever à l’opposition la possibilité de se faire parrainer par seulement 13 députés que ce projet de loi controversé a été agité un moment avant de se heurter à l’hostilité même des députés de la mouvance présidentielle.
Si tant est que le projet Pastef est plus important que la personne de Sonko, les « patriotes » auraient tort de ne pas saisir cette opportunité qui leur est offerte pour trouver une candidature de substitution à celle de leur leader emprisonné.
C’est ce que dicte la real politik. A moins les « patriotes » ne s’attachent au culte de la personnalité et ne s’accrochent à la candidature de Sonko qui est désormais plus qu’improbable. Mais, faudra auparavant que Sonko sache raison garder et qu’il pense enfin à sauver sa vie et, par ricochet, celle du projet Pastef.
Momar DIONGUE