Faut-il reporter les législatives ?

Le rejet et l’invalidation de plusieurs listes de coalitions de l’opposition, tout comme la validation de la liste nationale de Benno et l’annulation de celle de Yewwi Askan-Wi, ont fini de créer une situation politique tendue. Un véritable imbroglio politique, voire une impasse, à un peu plus d’un mois seulement des législatives prévues le 31 juillet. La perspective d’une campagne électorale mouvementée n’est pas non plus à écarter. Autant de menaces qui planent sur le Sénégal et qui ont amené plusieurs personnalités politiques, de la société civile ou encore des milieux religieux à demander le report des élections. Est-ce plus sage de voter pour le report ? Eléments de réponse.

Aujourd’hui, nul ne peut refuser d’admettre que le Sénégal traverse une véritable zone de turbulences. Un imbroglio politique sans précédent. Enfin, une situation de crise très périlleuse pour la stabilité du pays.

Tous les signaux que l’on perçoit depuis le déclenchement de cette crise ne sont guère rassurants. Ils annoncent une confrontation presque inévitable tellement les positions sont tranchées et que les protagonistes campent sur leurs positions respectives. Et aucun camp ne veut lâcher du lest.

En effet, depuis le rejet et l’invalidation de plusieurs listes de coalitions appartenant à l’opposition, la validation de la liste nationale de Benno et l’invalidation de celle de Yewwi Askan-Wi, les esprits s’échauffent. Le discours musclé, les invectives et les positions va-t-en-guerre et jusqu’au-boutistes caractérisent le plus l’espace politique. Bref, il y a une réelle rupture de confiance à telle enseigne que le dialogue paraît totalement rompu.

Pire, les manifestations du 17 juin ont enregistré pas moins de trois morts entre Dakar, Ziguinchor et Bignona. Sans parler des nombreux blessés par balle et des centaines d’arrestations. D’ailleurs, trois principaux leaders de l’inter-coalition Yewwi-Wallù Sénégal sont placés sous mandat de dépôt depuis lundi et attendent de connaître le sort qui leur sera réservé. Ce n’est pas tout, puisque le Sénégal se prépare à une seconde manifestation prévue ce 29 juin. Que va-t-il encore se passer, si elle est encore interdite ? Pour rappel, lors de la dernière conférence de presse des leaders de Yewwi, Ousmane Sonko a clairement fait savoir que ce jour, soit Macky Sall l’arrête, soit il le tue, mais rien ni personne ne l’empêchera de descendre sur le terrain. Un cocktail explosif qui risque de n’épargner personne. C’est ce qu’ont compris plusieurs acteurs de la société civile comme Alioune Tine, Youssou Dao et bien d’autres, mais également des personnalités politiques et des cercles religieux. Tous militent pour un report des élections législatives. Ils craignent que le pays ne s’embrase en raison de cette radicalisation qui peut mener vers le chaos.

 

Et si la Cour suprême avait le dernier mot ?

 

En tout cas, faute de pouvoir aller vers ces élections sereinement, à seulement un peu plus d’un mois du 31 juillet, le report est manifestement la décision la plus sage. Et même s’il parait difficile, voire impossible de renouer le fil du dialogue d’ici, le président de la République, lui, a les cartes en main. Il peut mettre la pédale douce et opter pour un report en attendant que les esprits se calment. A moins que la Cour Suprême qui doit statuer aujourd’hui sur l’affaire opposant l’Union Sociale Libérale (USL) à l’État du Sénégal, à propos du parrainage, ne permette au pays de sortir de l’ornière. Faut-il le rappeler, le 25 mars 2022, Me Abdoulaye Tine, Président du parti Union sociale libérale (Usl) avait saisi en référé la Cour Suprême pour solliciter la suspension de l’arrêté du ministre de l’Intérieur en date du 3 mars 2022.Cet arrêté fixait les modalités d’application du parrainage pour les élections législatives du 31 juillet 2022.Selon l’avocat et président du parti Usl, «le refus de l’Etat du Sénégal de se soumettre au droit en respectant l’arrêt de la Cour de Justice de la CEDEAO du 28 avril 2021 et qui déclarait illégal le système de parrainage, devra être sanctionné par le juge administratif. Un Juge qui est le garant et le gardien de la légalité administrative »

Pour rappel, l’affaire a été appelée à la barre le 9 juin dernier avant d’être renvoyée pour aujourd’hui au 23 juin. Le motif avancé par le Président de la Cour pour justifier ce renvoi était «la bonne administration de la justice». Si la décision attendue de la Cour suprême est favorable à Abdoulaye Tine, il est clair que les élections législatives prévues le 31 juillet prochain seront purement et simplement reportées et le processus repris à zéro.

 

 

Abdoulaye MBOW

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