Désescalade politique : Messieurs, à vous de voir !

« La non-violence est infiniment supérieure à la violence, le pardon est plus viril que le châtiment. Le pardon est la parure du soldat ». Cette assertion de Gandhi peut être bien perçue, bien écoutée, bien entendue, bien comprise et bien maitrisée au point de pouvoir être largement partagée par la classe politique sénégalaise. Toutes obédiences confondues.

A vrai dire, la violence verbale reste largement partagée au point d’installer le Sénégal dans une tension permanente. Les nerfs sont tendus. Les esprits sont tendus. Entre acteurs politiques, l’on se regarde en chiens de faïence. L’on se mesure du regard telles des bêtes blessés dans leur amour propre et prêts à en découdre. Ainsi, l’adversité politique s’accompagne d’une méfiance médisante et débouche sur une haine presque viscérale aux conséquences néfastes. Actuellement, qu’on le veuille ou non, les acteurs politiques traversent une rupture totale de confiance. Ils ne se parlent pas directement. Ils se parlent indirectement et leurs discours sont de plus en plus véhéments et tranchés. Chaque camp campe sur sa position. Personne ne veut lâcher du lest. Du côté du pouvoir, malgré le fait que l’Etat soit le garant de la sécurité des personnes et de leurs biens, du maintien de l’ordre et du respect de la lois et des règlements en vigueur, l’on donne l’impression de vouloir en abuser. On en abuse même.  On réprime à tout-va. Les arrestations arbitraires se multiplient. Les règlements de comptes politiques sont légion. Mieux, on lâche sur le terrain de la confrontation, des insulteurs dont la véhémence n’a d’égale que l’insolence. Certains vont plus loin : au nom du «pacoo», ils pensent qu’il faut enterrer le «pencoo». Dans ce lot, se trouvent les adeptes connus et reconnus de la longue traversée de Serengeti. Transhumants dans l’âme, ils sont pour la plupart des symboles de la tortuosité politique.

Du côté de l’opposition, même si leurs droits sont bafoués comme le soutiennent plusieurs experts en la matière, certains ont la propension à bander les muscles, à faire dans la surenchère. Parmi eux, il y a également des tenants du discours va-t-en-guerre qui a fini de créer les conditions d’une confrontation inévitable. Des discours avec un contenu par moment trop violent à telle enseigne que des Sénégalais ne manquent pas de les pointer du doigt. L’on n’hésite pas à s’attaquer aux Institutions et l’on dérape facilement dans le langage vulgaire.

Alors, qui pour dire stop ? Difficile actuellement dans ce Sénégal où la promotion des antivaleurs fait légion. Même les régulateurs sociaux semblent dépassés, voire impuissants. L’on crie à hue et à dia selon que les positions arrangent tel ou tel autre camp. Fort heureusement, des intellectuels de haut niveau alertent et donnent des orientations claires et précises sur l’Etat de droit. Cet Etat de droit pour lequel Macky Sall avait été élu en 2012 et par lequel le Sénégal doit nécessairement passer pour apaiser les tensions, créer les conditions d’un équilibre institutionnel. Créer surtout les conditions de l’instauration d’une démocratie électorale vivace, reflet des combats menés au Sénégal depuis plusieurs décennies. Il ne faut surtout pas passer pour pertes et profits ce que d’éminents Sénégalais ont construit à la sueur d’épiques combats. Soit sur le terrain de la confrontation politique, soit sur le terrain de l’Agora politique, où la pensée intelligente a été comme un vaccin immunisant face à l’obscurantisme citoyen et patriotique. Parmi ces hommes, le juge Kéba Mbaye dont la leçon inaugurale prononcée au temple du savoir résonne encore et traverse les années. Il est temps de tourner le dos à cette partisanerie excessive, source de la cécité de la pensée. Car, comme le disait Cioran, le fanatique est un individu qui est capable de prendre au sérieux sa propre étroitesse d’esprit. Et, en politique il en existe. Or, une désescalade est attendue de la classe politique sénégalaise. Elle est demandée. Elle s’impose !

Abdoulaye MBOW           

 

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