LA REQUETE DE MAITRE TINE REJETEE PAR LA COUR SUPREME

Nouvelle plainte devant la Cedeao pour des sanctions contre le Sénégal 

La Cour suprême n’a pas donné suite à la requête de Me Abdoulaye Tine, avocat et président du parti Union sociale libérale (Usl) qui dénonçait le refus de l’Etat du Sénégal de se soumettre au droit en respectant l’arrêt de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) à propos de la loi sur le parrainage. N’ayant pas obtenu gain de cause devant le juge administratif, il a saisi hier Jean Claude Kassi Brou, président de la Commission sous-régionale, d’une plainte pour activer des sanctions contre les dirigeants du Sénégal pour manquements aux obligations communautaires, violations graves des droits humains et maintien d’une législation antidémocratique.  

En saisissant d’une requête la Cour suprême, Me Abdoulaye Tine voulait obtenir gain de cause contre l’Etat du Sénégal qui a refusé de se soumettre au droit en allant dans le sens de respecter l’arrêt de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) du 28 avril 2021. L’instance judiciaire sous-régionale avait déclaré illégal le système de parrainage et avait demandé son amélioration. Ce que le juge administratif n’a pas appliqué en rejetant la requête de Me Tine. Malgré ce revers devant la Cour suprême et ne comptant pas abandonner ce combat, il a saisi la Cedeao d’une plainte contre l’Etat du Sénégal. L’intitulé de la plainte est : «recours en manquement contre la République du Sénégal.» Adressée à Jean Claude Kassi Brou, président de la Commission de la Cedeao, l’avocat et homme politique demande purement et simplement des sanctions contre les dirigeants du Sénégal pour manquement aux obligations communautaires, violation grave des droits humains, maintien d’une législation antidémocratique. Revenant sur les faits, Me Tine dans sa lettre adressée à M. Brou, dit qu’«après l’adoption de la loi instituant le parrainage citoyen au Sénégal pour toute élection, l’Union sociale libérale avait saisi la Cour de Justice de la Cedeao pour entrave à la libre participation aux élections. Par un arrêt en date du 28 avril 2021, la Cour a jugé illégal ce système de parrainage et avait ordonné au Sénégal de le supprimer dans un délai de 6 mois. Cependant, le Sénégal a catégoriquement refusé de se soumettre à cette décision, se mettant ainsi délibérément hors la loi.» Autant de raisons pour dénoncer «la violation des règles et principes en vigueur dans l’espace Cedeao» tout en invitant le président de la Commission de l’instance sous-régionale «à prendre officiellement position en faveur du respect des principes de convergence constitutionnelle communs à tous les États membres de la Cedeao.» En effet, écrit-il, «avec cette violation flagrante du droit national et du droit communautaire, les dirigeants de la République du Sénégal ont franchi la ligne rouge en matière de violation des droits de l’homme, des principes démocratiques et de l’État de droit. En conséquence de quoi, ils doivent être sanctionnés de manière individuelle pour leurs actes.» (…)

Violation de la sécurité juridique 

S’adressant toujours à M. Brou, Me Abdoulaye Tine signale qu’«il en ressort que cette législation viole ce principe de sécurité juridique. Et ceci d’autant plus que l’Etat demande de collecter des signatures, mais dans les faits, ne contrôle pas les signatures mais plutôt les données personnelles des signataires. C’est dire que l’Etat impose un mécanisme qu’il n’est pas en mesure de mettre en œuvre, ce qui entraîne dans les faits une confusion intellectuelle entre signatures et donnés personnelles.» Poursuivant, il ajoute que «pour pouvoir contrôler la validité des signatures, faudrait-il confronter la signature recueillie sur la fiche de parrainage avec la signature qui figure dans le fichier des pièces d’identité du ministère de l’Intérieur. Ce qui n’a pas pu se faire pour l’instant, compte tenu du fait que pour certains électeurs, il est mentionné sur leur pièce d’identité ‘’ne sait pas signer’’ et ceci en lieu et place de la signature.»

Prononciation de sanctions 

Citant au passage plusieurs articles relatifs au droit international, l’avocat et président de l’Usl n’a pas manqué de faire remarquer qu’«aux termes des normes communautaires, lorsqu’un Etat membre de la Cedeao n’honore pas les obligations qui lui incombent en vertu du Traité, des Conventions et Protocoles, des Règlements, des Décisions et des Directives, les Instances compétentes de la Cedeao qui constatent ces manquements peuvent d’abord inviter l’Etat défaillant à se conformer aux normes communautaires dans un délai raisonnable, ensuite prononcer des sanctions et enfin, s’il y a lieu, saisir la Cour de justice de la Communauté d’un recours en manquement contre l’Etat récalcitrant.» Mieux, fait-il encore savoir : «aux termes des dispositions de l’article 15.3 de l’Acte Additionnel A/SA.02/12, en cas de plainte pour manquement aux obligations communautaires, le Président de la Commission notifie la dénonciation à l’État en cause et lui accorde un délai de 30 jours à compter de cette notification, pour honorer les obligations dont le non-respect et la non-application lui sont reprochés, ou pour présenter ses observations en défense.» Ainsi, soutient-il, «le Président de la Commission dispose d’un pouvoir de police, qu’il a le devoir d’exercer, lorsqu’il a connaissance d’un manquement aux obligations communautaires, notamment, en cas de violation des dispositions du Protocole A/SP1/12/01 sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance.» Non sans défendre que «l’Acte Additionnel A/SA.02/12 portant régime de sanctions à l’encontre des États membres qui n’honorent pas leurs obligations confère au Président de la Commission un pouvoir de contrôle, d’injonction et de poursuite (Articles 15, 16 et 17).» A cet égard, il note qu’«il n’est pas inutile de rappeler qu’il est évident que toute carence du Président de la Commission, dans l’exercice de ce pouvoir de contrôle, d’injonction ou de poursuite, constitue une faute administrative susceptible d’engager la responsabilité de la Cedeao.» (…)

Carences de l’Etat du Sénégal 

Sur la même lancée, M. Abdoulaye Tine demande au président de la Commission de la Cedeao de «constater la carence de l’Etat du Sénégal concernant son obligation de supprimer le système de parrainage dans le délai de 6 mois comme lui avait demandé la Cour ; de constater qu’il y a une rupture de la démocratie au Sénégal ; de restaurer l’ordre démocratique normal en imposant aux dirigeants étatiques sénégalais la levée immédiatement des obstacles à la libre participation aux élections, conformément au Protocole A/SP1/12/01 de la Cedeao sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance.» Mais aussi de «promouvoir et protéger les droits de l’homme en général et les droits civils et politiques des citoyens sénégalais, en particulier et de sanctionner individuellement les dirigeants étatiques sénégalais, en application de l’article 22 du Protocole A/SP1/12/01 de la Cedeao sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance.»

Abdoulaye MBOW 

 

 

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